L’église rupestre Sainte-Marie de Vals taillée dans la roche

20/09/2022
L’église rupestre Sainte-Marie de Vals est unique en son genre et demeure une curiosité patrimoniale incontournable dans ce petit village de la moyenne vallée de l’Hers.
La partie supérieure de l’église date du Xe siècle, elle est construite au cœur de la roche et on y accède par un escalier taillé dans une faille naturelle. Au-dessus de cette nef naturelle a été édifié au XIe siècle un second niveau ainsi qu’au XIVe siècle un clocher aux allures de tour défensive. Sur les voûtes, des fresques romanes remarquables évoquent la vie du Christ.
C’est grâce aux travaux et aux fouilles archéologiques menés par l’abbé Durand, curé de Rieucros en 1945, que le site de Vals nous a livré un nombre considérable d’informations permettant de retracer près de 3 000 ans d’histoire locale. Les anfractuosités servaient déjà d’habitat naturel aux hommes de l’âge de bronze.

Peu à peu aménagés et complétés par des éléments architecturaux, ils ont permis l’édification d’un bourg au Moyen Age avec, à l’emplacement  d’un ancien temple gallo-romain, l’installation vers le IX-Xe siècle d’une église primitive dans une large fissure de la roche constituant une nef naturelle -d’où son qualificatif de « rupestre »-
Ce monument unique sur trois niveaux classé aux Monuments Historiques en 1910 et 1959 est certainement un des plus curieux du département, voire même des Pyrénées.
En effet construite dans un immense bloc de poudingue en utilisant comme accès une faille naturelle de la roche, un escalier de 23 marches en pierre de taille amène à la nef inférieure. Elle est composée de trois parties : l’absidiole à droite en rentrant, la nef et la chapelle de la faille de la source.
L’absidiole, appelée parfois et de manière impropre « crypte », est la partie visible la plus ancienne, certainement appartenant à un édifice préroman. Son étroitesse et sa faible hauteur permettent de la comparer aux catacombes. Des maçonneries ont dessiné de petites chapelles latérales archaïques.
La nef à proprement parler date du Xe siècle et mesure 11 mètres de longueur sur 2,70 de largeur. Son plafond est constitué par des arcs transversaux et des poutrelles de chêne soutenant des dalles à plat. Elle accueille une cuve baptismale au pied de laquelle repose l’abbé Durand (décédé en 1970) ainsi que la tombe de « Dame Germaine de Cases, comtesse de Lascaris-Vintimille, décédée le 5 septembre 1760 ».
Enfin on accède à la chapelle Sainte-Marie, datant du XIIe siècle. Son abside rectangulaire de 6 mètres de long sur 4 mètres de large comporte une voûte légèrement outrepassée, renforcée par des arcs en saillie, en plein cintre. Une fenêtre unique a été posée au XIVe siècle.


L’abbé Durand découvre en 1954  une série de fresques datant de la fin du XIe siècle et qui ont beaucoup d’affinités avec celle de la catalogne espagnole. Les grands spécialistes de l’art roman comme Marcel Durliat y ont vu des ressemblances avec les maîtres de Tahüll et de Pedret : allure hiératique des personnages à rapprocher des fresques byzantines et registre de couleurs à dominante rouge, noire, grise, jaune ou blanche (pas de vert ni de bleu).

A l’origine, l’abside était entièrement couverte de ces peintures, réalisées à l’eau et directement posées sur du mortier frais. Ce décor est parfaitement adapté au plan rectangulaire du chœur et illustre trois aspects de la vie de Jésus :

- 1ère travée : la naissance de Jésus, l’Annonciation et la Nativité.
L’Annonciation évoque le texte de Saint-Luc avec l’ange Gabriel. La Nativité est figurée par une représentation peu fréquente. En effet, la Vierge est allongée sur une couverture ornée de médaillons, elle vient d’accoucher. Sur le registre supérieur on assiste au bain de l’enfant Jésus.

- 2ème travée : La période évangélique
C’est la travée consacrée aux apôtres et du jugement dernier. On peut distinguer, groupés deux par deux :Saint-André, Saint-Pierre, Saint-Philippe et un dernier Saint non encore identifié.

- 3ème travée : la Parousie
Dédiée au Christ Pantocrator avec une très belle scène du jour du jugement dernier où le Christ en majesté dans sa mandorle bénit de sa main droite et tient un livre dans sa main gauche. Les animaux représentés symbolisant les quatre évangélistes sont accompagnés d’apôtres auxiliaires : trois de chaque côté et au milieu un ange avec trois paires d’ailes (chérubin ou séraphin) alors que sur les bords les archanges déroulent leurs phylactères.

Enfin sur le mur du chevet, on distingue une fresque représentant l’Epiphanie, mettant en scène la Vierge en majesté et un roi mage (certainement Balthazar) ; le percement d’une fenêtre en a malheureusement altéré la lisibilité.

Deux autres fresques partiellement endommagées sont situées de part et d’autre de la première travée.

Des escaliers latéraux assurent l’accès à la nef supérieure, ou grande nef, ayant subie de nombreux aménagement jusqu’au XIXe siècle où, à la suite d’un miracle, la marquise de Portes  fait surélever les murs, coiffer le vaisseau d’une voûte en plâtre et apposer ses armes sur deux vitraux représentant Saint Loup et Saint Georges. Son niveau est supérieur de 7,80 mètres par rapport à celui de l’entrée de l’église.

Au fond, s’alignent les arcs supportant la chapelle haute de pur style roman, vouée à Saint-Michel : en effet l’église étant dédiée à la vierge Marie, Saint-Michel a pour vocation de protéger Notre-Dame.

C’est au-dessus de la chapelle Saint-Michel qu’est édifiée au XIVe siècle une tour ronde pour défendre le site contre les routiers ou les assaillants de la guerre de Cent ans. Un escalier mène à une terrasse crénelée qui prouve bien le caractère défensif de cet édifice.

Une croix discoïdale en grès, appelée souvent croix celtique est fixée en hauteur, suite à une tentative de vol en 1875, sur la paroi de la tour. Elle date du XIIIe siècle et proviendrait plutôt du cimetière médiéval. Cependant on peut noter que cette croix à branches égales, symbole de la religion du soleil à l’âge de bronze, marque souvent dans le Sud-Ouest l’extérieur des églises romanes ou sert de croix funéraire, il s’agit alors de croix dites des tombes discoïdales.

Enfin, sur cette architecture médiévale, un clocheton triangulaire a été ajouté au XIXe siècle pour coiffer le sommet de la tour. Il est surmonté d’une croix, d’une girouette et d’une étoile en fer forgé.

Notons qu’il existe à Vals, à côté de la mairie, un petit musée archéologique aujourd’hui fermé au public  pour cause de rénovation.

On peut aussi admirer, sur la place, un puits classé  dont la vieille bascule servait à peser les animaux.
Un petit village très pittoresque à ne manquer sous aucun prétexte.